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Réseau canadien de recherche sur le langage et l’alphabétisation
clarté. La science au service du développement du langage et de l’alphabétisation des enfants  
les antécédents familiaux : le plus vieux des remèdes possibles?
 
 
 

Les origines du langage humain et l’acquisition des capacités de lecture et d’écriture sont liées à la transmission de la tradition familiale d’une génération à la suivante. D’abord orales, puis inspirant les premières communications écrites, les légendes familiales étaient de nature à la fois historique et culturelle. Mais, de façon tout aussi importante, elles se rattachaient à un contexte et avaient donc un sens pour les personnes qu’elles concernaient.

Transportons-nous maintenant quelques milliers d’années plus tard dans un petit village de l’Île-du-Prince-Édouard. Là, les enfants avec des possibilités limitées depuis plusieurs générations sont confrontés à des difficultés de langage, de lecture et d’écriture qui dépassent largement celles vécues dans les grands centres.

Les enfants sont éduqués à l’école par des enseignants issus de la classe moyenne et de milieux urbains, où il est tout à fait normal de lire et de communiquer.

Ce que les professeurs lisent et écrivent peut n’avoir aucun rapport avec la vie d’un jeune garçon dont le père éprouve lui-même des difficultés de lecture et d’écriture et dont l’avenir, à première vue, paraît sombre.

Le langage et l’alphabétisation, et plus particulièrement la lecture, semblent sans valeur pour un enfant dans une situation pareille. Les interventions habituelles ont peu d’effets. L’enseignement de la lecture et de l’écriture qui est offert manque de liens avec la vie de l’enfant.

Pour bon nombre d’enfants de milieux ruraux ou de villages isolés, un faible niveau d’alphabétisation équivaut à une peine d’emprisonnement à perpétuité.

La scientifique du Réseau canadien de recherche en langue et en alphabétisation Vianne Timmons, de l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard, a développé une idée qui, justement, pourrait ramener le contexte nécessaire à une plus grande efficacité des interventions. Elle met présentement sa science à l’épreuve.

Une étude indépendante menée à l’Île-du-Prince-Édouard avait montré que 40 p. 100 des adultes présentaient des lacunes d’alphabétisation. Il fallait faire quelque chose. Timmons a commencé à chercher les solutions qui offriraient « le meilleur rendement du capital investi ». Elle s’est tournée vers les enquêtes de nature sociale portant les milieux familiaux et a demandé des volontaires par l’entremise des églises locales.

« Il fallait que ça vienne des familles elles-mêmes », dit Timmons. Nous voulions faire quelque chose avec elles plutôt que pour elles. Le volontariat était essentiel pour assurer la participation. »

Les familles participantes croyaient en l’importance de renforcer les capacités de lecture et d’écriture.

« L’une des familles, qui n’avait jamais vu la ville et qui trimait pour mettre du pain sur la table, avait investi des économies substantielles dans la formation de ses enfants à la lecture et à l’écriture par des spécialistes. Cela n’avait pas donné beaucoup de résultats, mais la famille s’est quand même portée volontaire pour cette nouvelle possibilité. »

La famille est au cœur du projet. « Ça doit commencer à la maison, dit Timmons. Les écoles ne peuvent pas résoudre le problème seules. » Dans neuf des dix familles participantes, tant les pères que les fils présentaient des déficiences de lecture et d’écriture. Le problème était systémique.

Timmons a donc mis de l’avant une solution à domicile, axée sur la famille. Elle et son équipe élaborent et mettent à l’épreuve un programme de formation familiale fondé sur la documentation de l’histoire familiale, qui rend la lecture et l’écriture plus pertinents. Les familles travaillent ensemble et apprennent dans un contexte qu’elles sont à même de comprendre.

« J’ai été bouleversée par le progrès et la constance des résultats obtenus avec les dix premières familles, dit Timmons. Les gens se servent de leur histoire familiale pour se créer un avenir. »

Lorsque ce projet sera terminé, au cours de 2002, Timmons prévoit élargir la recherche à trente familles. Elle a aussi présenté le projet à des leaders autochtones, grâce du Secrétariat national à l’alphabétisation, et travaillera avec dix familles mi’kmaq de l’Île-du-Prince-Édouard et de la Nouvelle-Écosse dans un proche avenir.

« Nous faisons de la recherche fondée sur les faits et créons des procédures d’intervention dans les milieux marginaux, conclut Timmons. Bientôt, nous pourrons remplacer le travail au jugé par une base de données de résultats, d’idées de programmes de formation et d’ateliers pour les enseignants que tous pourront utiliser. »

Le fait d’avoir trouvé une solution qu’on peut faire remonter au début de l’histoire humaine et aux origines de la lecture et de l’écriture est une bonne nouvelle pour les dix millions de Canadiens qui vivent dans des milieux ruraux ou isolés.

 

   
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